SNCL

Syndicat National des Collèges et des Lycées

  • Réforme de la formation des enseignants : un progrès à consolider

    Le SNCL salue une avancée historique

    Notre syndicat, engagé depuis des années en faveur d’une entrée progressive dans le métier et d’une rémunération précoce (voir nos revendications pour la formation initiale), se réjouit de la concrétisation du concours en fin de L3. Ce dispositif répond à une triple urgence : améliorer les conditions de vie des aspirants professeurs, renforcer la dimension professionnalisante de la formation et pallier la pénurie de candidats (plus de 3 000 postes non pourvus en 2024 selon la Cour des comptes).

     

    Les points positifs à souligner :

    – Le premier mérite de cette réforme est de revenir sur l’actuel parcours de formation qui n’était pas tenable pour les étudiants. Ceux-ci devaient tout à la fois, pendant l’année de M2, rédiger leur mémoire, valider leur Master, effectuer leurs stages, et passer le concours.

    – Une professionnalisation anticipée : la création d’une licence dédiée au professorat des écoles dès 2026, avec des stages dès la L1, permettra aux futurs professeurs des écoles d’acquérir une expérience de terrain progressive. Les stages en M1 et M2 répondent à la même exigence.

    – Un statut attractif : la rémunération à 1 400 € nets mensuels en M1 et le statut de fonctionnaire stagiaire en M2 (1 800 € nets) constituent une avancée sociale majeure, susceptible d’améliorer les conditions de vie d’étudiants parfois en situation précaire. À long terme, ce seront aussi des trimestres validés pour la retraite et la possibilité (en l’état actuel de la réglementation) d’obtenir une retraite à taux plein à 64 ans pour une carrière complète. 

     

    Des réserves et des points de vigilance :

    – L’obligation de servir pendant quatre ans : si cette mesure a pour objectif de sécuriser les effectifs, elle pourrait produire l’effet inverse en dissuadant les vocations incertaines, notamment chez les étudiants tentés par une réorientation après le M1. Il s’agit d’une mesure repoussoir qui s’ajoute au contraignant système de mutation géographique, que le SNCL demande de repenser.

    – Une vigilance sur la charge de travail : les fonctionnaires stagiaires doivent suivre un parcours qui leur permette bel et bien de parfaire leur formation ; ils ne doivent pas être utilisés comme moyen d’enseignement improvisé pour pallier le manque actuel de professeurs. A cet égard, la mise en responsabilité à hauteur de 50 % du temps en Master 2 paraît démesurée.

    – Le SNCL exige des garanties budgétaires pour les masters MEEF rénovés, afin d’éviter un appauvrissement des contenus pédagogiques. La réforme ne doit pas se résumer à un alignement technocratique sur des quotas au détriment de l’expertise disciplinaire et didactique. Il faudra des formateurs en nombre suffisant, et pour y parvenir, une rémunération de ces postes qui soit à la hauteur.

     

    Un calendrier ambitieux, des risques réels :

    – La mise en œuvre dès septembre 2025 des préparations au concours en L3 laisse peu de temps aux universités pour adapter leurs maquettes. Le SNCL craint des disparités territoriales, certaines académies manquant de formateurs qualifiés. A ce titre, le SNCL appelle à ce que la rémunération des formateurs soit augmentée.

    – Le casse-tête de la transition : Jusqu’en 2028, coexisteront deux voies d’accès (concours en L3 et en M2), créant une complexité administrative pour les rectorats et une inégalité de traitement selon l’année de candidature, contre lesquelles le SNCL met en garde. Certaines tentatives précédentes de réforme ont échoué pour moins que cela !

    Calendrier à retenir :

    → 2025 : Premières préparations au concours en L3
    → 2026 : Lancement de la licence dédiée au professorat des écoles
    → 2028 : Fin de la période transitoire à deux concours

     

    Un enjeu de société

    Cette réforme ne sera légitime que si elle s’accompagne d’une revalorisation salariale globale des enseignants tout au long de leur carrière. Le SNCL rappelle que le niveau de rémunération reste le premier frein à l’attractivité du métier, et les premières pistes présentées par la ministre pour la revalorisation des « milieux » de carrière sont affligeantes à cet égard.

    Enfin, la diminution des effectifs par classe reste également une condition essentielle pour redonner du sens à notre métier : le SNCL appelle le ministère à profiter de l’appel d’air de la baisse démographique attendue sur les années qui viennent, afin d’amorcer une diminution des effectifs qui pourrait ramener la France vers la moyenne européenne (alors qu’elle est tristement leader en la matière à l’heure actuelle…). 

  • Devenir enseignant : des profils de plus en plus variés

    Les services statistiques du Ministère de l’Éducation nationale montrent une évolution significative des profils recrutés par les concours enseignants.

    Le fait marquant est la diminution du poids des étudiants au profit de candidats ayant déjà eu une expérience professionnelle. Entre 2015 et 2017, 38 % des lauréats aux concours de professeurs des écoles avaient plus de 30 ans, alors qu’ils étaient deux fois moins nombreux en 1994, selon un article de la revue Éducation et formations publié au mois de décembre 2024. Dans le 2nd degré, sur la même période, ce sont même 42 % des lauréats qui avaient passé la trentaine au moment de leur réussite aux concours d’enseignants.

    Ces néo recrutés ont toutefois des profils bien différents. Avant de devenir fonctionnaires, certains salariés étaient enseignants contractuels (de courte ou longue durée). Cela peut toutefois correspondre à des profils divers : soit des candidats n’ayant pas été admis aux concours enseignants et qui commencent à travailler en tant que contractuel en attendant la session suivante, soit des personnes en reconversion professionnelle qui utilisent le statut de contractuel provisoirement pour tester le métier.

    Dans le second degré plus que dans le premier, le recours aux contractuels est fréquent. Le passage par le statut de contractuel est de plus en plus vu comme une passerelle vers une titularisation. Un contractuel du secondaire sur trois devient titulaire, majoritairement en tant que certifié ou PLP.

    Mais le profil des reconvertis est loin d’être homogène. Par exemple, les cadres reconvertis dans le second degré sont particulièrement nombreux à avoir eu un emploi dans la Fonction publique avant d’obtenir le concours (68 %, contre 28 % dans le 1er degré), et notamment dans le domaine de la formation. Mais nombreux sont ceux qui abordent une carrière dans l’Éducation nationale comme une deuxième -ou troisième- chance.

    Le SNCL est heureux d’accueillir ces nouveaux collègues mais se pose le problème de leur formation. Faut-il personnaliser cette formation en fonction du profil des lauréats ? Notre Institution le pense et y voit un moyen de « mieux accompagner » les enseignants reconvertis pour « assurer leur réussite professionnelle ».

    Le SNCL pense qu’il y a là un danger de fragmenter encore davantage et séparer les collègues, d’atomiser les méthodologies sous couvert de personnalisation. Nous pensons au contraire qu’une fois recrutés, tous les néo enseignants doivent pouvoir bénéficier d’une formation solide et homogène qui leur permettra de pouvoir compter sur leurs collègues et favorisera les solidarités. C’est le but de nos métiers.

  • École : évolution de la formation et de l’évaluation des directeurs

    La formation des directeurs 

    Suite à la Loi Rilhac, un arrêté précise désormais les modalités de formation des directeurs d’école. Le SNCL constate que le pouvoir décisionnel du directeur est spécifié : il répartit les moyens d’enseignement, il anime et conduit le projet pédagogique, devenant pilote pédagogique de son école, il assure la sécurité des personnes et des biens, il veille à l’hygiène et à la salubrité de l’école… La fonction de directeur d’école évolue petit à petit vers plus d’autonomie dans les prises de décisions ce qui est intéressant.

    Toutefois, le SNCL reste vigilant car ces changements engendrent plus de responsabilités et de missions pour les directeurs. Il faut donc que le temps de décharge et les compensations financières soient au rendez-vous.

    Arrêté du 21/03/2024 – Formation des directeurs d’école (extrait) : 

    « La formation est obligatoire pour tout instituteur ou professeur des écoles nommé directeur d’école. La durée de cette formation est de 3 semaines » (…) « La formation des directeurs d’école a pour objectif de leur permettre d’assurer les responsabilités inhérentes au pilotage pédagogique, au bon fonctionnement de l’école et aux relations avec les représentants légaux des élèves et les partenaires de l’école.

    Cette formation spécifique porte sur les compétences et les connaissances liées à :

    – l’organisation du système éducatif ;

    – l’admission, l’accueil, la surveillance et le suivi de l’assiduité des élèves ;

    – l’accessibilité de l’école pour les élèves à besoins éducatifs et pédagogiques particuliers ;

    – l’animation et la conduite du projet pédagogique de l’école ;

    – la coordination de l’équipe pédagogique ;

    – la conduite du conseil d’école et du conseil des maîtres qu’il préside ;

    – la répartition des moyens d’enseignement et l’organisation des services des personnels ;

    – l’élaboration et le suivi du règlement intérieur, premier vecteur d’une vie scolaire sereine et propice aux apprentissages ;

    – en lien avec les autorités administratives compétentes, la prise de décision visant à assurer la sécurité des personnes et des biens, l’hygiène et la salubrité de l’école sur le temps scolaire ; 

    – le dialogue avec la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale compétent, le cas échéant avec d’autres collectivités territoriales ;

    – la relation avec les familles, les représentants légaux des élèves et les représentants élus des parents d’élèves, les associations et les autres services de l’Etat ».

    Les directeurs auront donc trois jours de formation avant l’inscription sur la liste d’aptitude. Une fois les résultats du mouvement promulgués, les futurs directeurs bénéficieront de trois semaines de formation. Une fois passée la rentrée, ils auront deux semaines de formation puis trois jours à la fin de la première année d’exercice. Les collègues faisant fonction auront aussi une formation dans les premiers mois de l’année.

     

    Modalités d’évaluation des directeurs d’école :

    La circulaire du 20 mars 2024 précisant les modalités de l’évaluation des directeurs d’école a été publiée dans le BO du 11 avril 2024. L’IEN est chargé de l’évaluation du directeur d’école et est réalisée au plus tard après trois ans d’exercice dans ses fonctions, puis au moins une fois tous les cinq ans : « le directeur d’école est informé individuellement, avant le début des vacances d’été, de la programmation d’un entretien professionnel pour l’année scolaire à venir. La date de cet entretien lui est notifiée au plus tard quinze jours calendaires avant la date de celui-ci (…). Il se déroule en dehors des heures de classe ». Les directeurs ayant un rendez-vous de carrière auront leur entretien professionnel l’année suivante.

    Le SNCL demande à ce que les directeurs non déchargés bénéficient d’un rattrapage du temps de l’entretien sur les 108h.

    L’entretien porte sur « la maîtrise des fonctions occupées et les compétences mises en œuvre aux conditions d’organisation et de fonctionnement du service dont il relève et sur les besoins de formation du directeur d’école compte tenu de son expérience professionnelle, la spécificité de l’école dont il assume la direction et des besoins qu’il exprime ».

    Un compte-rendu écrit est rédigé à l’issue de l’entretien par l’IEN et comporte « une appréciation générale exprimant la valeur professionnelle du directeur d’école ». Un formulaire de compte-rendu est joint à l’arrêté et spécifie les grandes lignes des attendus de cette évaluation (voir pièce-jointe de cet article).

    Les modalités de recours sont également spécifiées :« ce recours hiérarchique est exercé dans un délai de quinze jours francs suivant la notification à l’agent du compte rendu de l’entretien. Le DASEN qui a été saisi notifie sa réponse dans un délai de quinze jours francs (…). La commission administrative paritaire compétente peut demander, sur requête de l’intéressé, et après exercice d’un recours hiérarchique, la révision du compte rendu de l’entretien professionnel à l’autorité saisie de ce recours ».

    Le SNCL souhaite que ces entretiens soient avant tout constructifs et permettent aux directeurs d’exprimer leurs besoins en moyens humains, financiers, formatifs. Les directeurs doivent être entendus car ils sont en première ligne sur le terrain. Ils connaissent les difficultés et les avantages de leur école et sont source de propositions constructives pour améliorer le quotidien. Pour le SNCL, qui continue de demander une augmentation de la prime de direction au regard des missions supplémentaires demandées, ces entretiens doivent permettre aux directeurs et aux IEN de travailler main dans la main pour nos Écoles.

  • Formation des enseignants : une réforme qui irait dans le bon sens ?

    Et voilà : il a suffi de quelques déclarations médiatiques et d’une fuite de documents pour que la réforme de la formation des enseignants soit à nouveau sur le tapis. Si elle aboutit, elle sera tout de même la 4ème réforme de ce type depuis 2010, et la deuxième sous Emmanuel Macron. En effet, alors que la réforme Blanquer (qui ne sera pas regrettée) avait créé les Inspé et placé le concours de recrutement en fin de Master 2 en 2019, le gouvernement revoit déjà sa copie.

    Evoquée par Emmanuel Macron dès sa réélection en 2022, puis annoncée par Gabriel Attal à l’automne dernier, il aura fallu attendre la fuite d’un document de travail du Ministère de l’Education Nationale fin mars pour avoir des précisions sur le contenu de l’ensemble. Le projet qui y était esquissé a finalement été rendu officiel par l’annonce d’Emmanuel Macron le 5 avril 2024 lors d’un déplacement dans l’école primaire Blanche à Paris.

     

    Premier constat : un copié-collé de nos revendications !

    En premier lieu, on ne peut que regretter l’absence totale de concertation avec les organisations représentatives des personnels durant toute la phase d’élaboration de ce projet, et dénoncer le degré de mépris des personnels qui se dédient à cette formation et qui, eux n’ont plus, n’ont pas vu passer l’ombre d’une consultation sur le sujet. Mais il y a au moins une bonne surprise à la lecture des premières lignes directrice : il s’agit quasiment mot pour mot de la direction que porte le SNCL dans ses motions depuis plusieurs années.

    La grande nouveauté de cette réforme consisterait en effet à refondre le concours de recrutement et à l’avancer dès l’année de L3, pour les futurs enseignants du premier comme du second degré. Les lauréats poursuivront ensuite en Master pendant deux années en tant qu’« élèves fonctionnaires », au cours desquelles ils seront rémunérés et alterneront enseignements et stages d’observation ou mise en responsabilité.

    Or cette proposition est extrêmement proche de nos revendications réaffirmées lors de notre congrès national de juin 2023, dont il vaut la peine que nous citions un extrait tant les similitudes sont frappantes jusque dans le vocabulaire choisi :  

    « Le SNCL considère que la meilleure solution réside dans le passage du concours après la licence […].Ensuite, deux années de formation professionnelle, rémunérées de façon attractive et prises en compte pour le calcul de la pension avec le statut d’élève-professeur déboucheraient sur l’attribution du master.

    Pour garantir une meilleure qualité de formation, l’alternance entre l’établissement d’exercice et l’INSPÉ doit être régulière dans le but de lier plus intimement les formations pratique et théorique.

    Il est indispensable d’adapter régulièrement les concours et leurs contenus à l’évolution des métiers de l’enseignement afin d’éviter les décalages entre ce qui est demandé et la réalité du terrain.

    Pour le SNCL il est primordial que les stages se multiplient progressivement tout au long du cursus universitaire et de la préprofessionnalisation. »

    Le SNCL a donc commencé par se réjouir de voir ses motions ainsi traduites en projet de réforme et ne peut qu’espérer que cette nouvelle mouture de la formation initiale sera enfin la bonne, ou à tout le moins plus pérenne que les précédentes.

    L’un des principaux avantages du nouveau programme de formation serait de rendre l’entrée dans le métier beaucoup plus attractive pour les jeunes enseignants. Emmanuel Macron a en effet déclaré vouloir « élever le niveau qualitatif de la formation des enseignants, mieux préparer les futurs professeurs à l’exercice de leur métier, renforcer l’attractivité du métier et répondre à la crise de recrutement ». Une ambition qu’il est difficile de ne pas partager. Mais le Président a-t-il les moyens de ses ambitions ?

    Il faut être clair sur un point : ces deux années de Master rémunérées doivent offrir un salaire décent, et permettre de valider 4 trimestres par année civile pour les droits à pension. Pour le SNCL, c’est un enjeu d’autant plus crucial depuis la réforme des retraites : ce serait pour les professeurs le seul moyen d’obtenir un départ à la retraite à 64 ans et à taux plein après une carrière complète. Notre syndicat sera donc particulièrement intransigeant à ce sujet car le diable se cache souvent dans les détails…

     

    Que prévoit la réforme dans le détail ?

    C’est probablement là que les difficultés commencent, car malheureusement, passées les grandes lignes directrices, le projet semble vite sonner très creux et l’on voit avant tout l’administration s’adonner à son exercice préféré de remplissage et de langue de bois. Ainsi, difficile d’imaginer une réforme de la formation des enseignants sans que le ministère ne s’offre le plaisir cosmétique de changer de nom la structure qui s’en charge… Après les Ecoles normales, après les IUFM, après les ESPE puis les fulgurants INSPE, réservons un tonnerre d’applaudissements pour… les ENSP ! Les Ecoles normales supérieures du professorat – il fallait y penser -, aussi appelées « Ecoles normales du 21ème siècle » dans le jargon ministériel. Au moins la boucle semble-t-elle être bouclée, et peut-être nos instituts de formation cesseront-ils désormais de changer de noms tous les cinq ans ?

    Au-delà du nom cependant, d’autres directions nouvelles s’annoncent plus inquiétantes. Dans son document de travail, le ministère tend à renforcer sa mainmise sur la direction de ces établissements et le contenu des formations. Il affirme ainsi qu’une « large place sera donnée aux tutelles (MENJ et MESR) pour l’assurance qualité », et veut instaurer « un référentiel de compétences décliné en maquettes nationales avec un degré de granularité très fin ».

    Des propos cavaliers complètement contraires à la philosophie originelle des instituts de formations. France Université a d’ailleurs réagi dans un communiqué pour mettre en garde contre une « désuniversitarisation » (sic) de la formation des enseignants :

    « s’il est légitime que l’employeur définisse les compétences attendues des futurs professeurs, il ne doit pas se substituer aux opérateurs. Il revient au HCERES d’évaluer ces parcours de licence et master, et aux universités de prendre en compte ces évaluations et les attentes de l’employeur, mais il ne saurait être question d’une formation seulement hébergée dans les locaux de l’université. […] la formation des enseignants est une compétence que le législateur a confiée de longue date à l’université, et elle doit le rester, à l’instar de ce qui se fait partout dans le monde, là où l’École se porte bien ».

    Le SNCL partage cette préoccupation et demande à ce que le gouvernement garantisse la prérogative de l’université à définir de manière autonome le contenu des formations des enseignants.  

    Et cette autonomie, pour être garantie, doit en outre s’appuyer sur des délais de mise en oeuvre raisonnable… or c’est tout le contraire qui se profile.

     

    Des modifications majeures dans le premier degré

    Le premier degré est majoritairement concerné par les nouveautés de cette réforme. D’abord, une licence spécifique serait créée dans les universités pour les étudiants se destinant à devenir professeur des écoles : une « licence mention préparation au professorat des écoles (LPPE) ». A l’heure actuelle en effet, la plupart des aspirants suivent une licence de français ou encore de mathématiques, ou bien une « licence préparatoire au professorat des écoles » mais qui est pilotée par l’une de ces composantes. Dorénavant, la LPPE sera pilotée directement au sein des nouvelles ENSP.  

    Ce programme de licence serait découpé ainsi :

    – « 50 % académique : français, mathématiques, sciences, langues vivantes, histoire-géographie, Arts, EPS

    –   30 % pédagogique : valeurs de la République, didactique des disciplines, pédagogie générale

    –   20 % terrain : stage + connaissance du système éducatif, élèves à besoins particuliers, exploitation du stage ».

    Ce projet prévoit que les enseignants au sein de ce cycle préparatoire seront :

    –   « à 50 % des professeurs du MENJ : 30 % choisis et mis à disposition du cycle préparatoire pour trois ans renouvelables une fois (intégration à un ‘cursus honorum’ : professeurs des écoles expérimentés, professeurs du second degré repérés) et 20 % choisis pour les stages et les spécialisations ‘terrain’,

    –     à 50 % des enseignants de l’université ».

    Par ailleurs, suivre cette licence spécifique permettra aux étudiants d’être dispensés des épreuves écrites d’admissibilité du CRPE (passé désormais en fin de L3). En fin de L1 et de L2, les étudiants passeraient à la place des « tests normalisés conçus par le MENJ », en plus de leurs examens de licence.

    Le SNCL met toutefois en garde contre le risque de décourager les candidats au CRPE venus d’autres licences, qui constituent à l’heure actuelle un vivier important. Le ministère assure que des passerelles existeront toujours, avec notamment un « module de préparation au concours (60 ECTS/an, axés pédagogie, didactique, terrain) » offert en complément d’une licence disciplinaire, et dispensé par des enseignants de l’ENSP.

     

    Les concours de recrutement à Bac+3, avec quelles modifications ?

    Si le ministère promet des concours « rénovés, simplifiés », le format des épreuves semble pour autant rester identique, à savoir deux épreuves écrites d’admissibilité, suivies de deux épreuves orales d’admission. Les intitulés de chaque épreuve semblent reprendre l’esprit de leur prédécesseur, avec toutefois quelques nuances.

    Pour le premier degré, les épreuves seraient :

    –     deux épreuves d’admissibilité écrites (desquelles seraient dispensés les étudiants ayant suivi la LPPE) : « vérification de la maîtrise des savoirs fondamentaux en français et en mathématiques » ; « vérification des connaissances dans les autres disciplines »

    –     deux épreuves d’admission orales : « évaluation de la capacité d’expression et de réflexion grâce à un exposé disciplinaire (maths ou français) et un échange » ; « appréciation de la motivation, de la capacité à se projeter dans le métier enseignant et à transmettre et incarner les valeurs de la République ».

    Pour le second degré :

    –   deux épreuves d’admissibilité écrites : « vérification des connaissances disciplinaires » ; « appréciation de la capacité d’analyse sur les compétences disciplinaires spécifiques sur la base de supports »

    –     deux épreuves d’admission orales : « évaluation de la capacité d’expression et de réflexion grâce à un exposé disciplinaire et un échange » ; « appréciation de la motivation, de la capacité à se projeter dans le métier enseignant et à transmettre et incarner les valeurs de la République ».

    Le SNCL s’étonne toutefois qu’il n’est plus question d’évaluer les compétences « didactiques » ni « pédagogiques » des candidats. Si l’on peut concevoir qu’un concours avancé en L3 ne permette pas d’évaluer autant de compétences qu’auparavant, il s’agit d’un revirement philosophique plutôt brutal, alors que depuis de nombreuses années la tendance était au contraire au renforcement des évaluations de ces aspects du métier.

     

    Une refonte du Master

    Après réussite du concours, les lauréats du premier degré comme du second seront admis en ENSP pour leur Master, « sous statut de la fonction publique et reçoivent une formation de deux ans avec prise de fonction sur le terrain selon une progressivité renforcée ».

    La rémunération s’élèverait au salaire minimum en M1 soit environ 1 400 € nets par mois, et au salaire actuel des stagiaires en M2, soit environ 1 800 € nets par mois. Cependant, des rumeurs circulent déjà sur une rémunération plus faible encore en M1, ce que le SNCL considérerait comme inacceptable pour des lauréats d’un concours de la fonction publique. Par ailleurs, nous attendons du ministère l’engagement que ces années de travail seront pleinement comptabilisées pour la validation de 4 trimestres par année civile pour les droits à pension, et qu’elles seront également prises en compte pour l’avancée dans les échelons à l’entrée dans le corps d’appartenance.

    Côté formateur, les enseignants devraient être à 50 % des professeurs du MENJ et à 50 % des enseignants de l’université. L’accent serait mis sur « la pratique professionnelle » et « la mise en responsabilité ».

    La maquette de formation serait la suivante :

    En M1 :

    – 37,5 % (1,5 jour par semaine) de temps dédié à la mise en application sur le terrain, en stage d’observation et de pratique accompagnée

    –  25 % de pratique et enseignements professionnels

    –  37,5 % d’approfondissements universitaires disciplinaires et optionnels.

    En M2 :

    –   50 % (2,5 jours par semaine) de temps dédié à la mise en responsabilité avec un mémoire sur la pratique

    –    20 % de pratique et enseignements professionnels

    –    30 % d’approfondissements universitaires disciplinaires et optionnels.

    Les étudiants seront enfin titularisés à bac+5 en cas d’obtention du master ENSP et suite à un « avis sur les périodes de stages d’observation et pratique accompagnée (SOPA) et de mise en responsabilité ».

     

    Un calendrier une fois de plus précipité

    Réforme des parcours, réforme des épreuves, refonte des équipes, que de projets… mais dans quels délais le ministère ambitionne-t-il de mettre tout cela en place ? Un délai probablement réaliste serait une amorce des changements sur l’année scolaire 2024-2025, pour une bascule progressive entre 2025 et 2027, pour espérer une mise en place complète du dispositif à partir de 2028-2029.

    Le calendrier envisagé, hélas, n’est pas celui-ci, et se révèle au contraire sidérant de naïveté : le ministère espère en effet que tout ceci sera opérationnel… dès la rentrée prochaine !

    Cette folie (mais qui n’a toutefois pas encore été confirmée) suivrait le rythme suivant :

    • mai 2024 : publication du programme du concours niveau Licence 2025 (version transitoire avant la montée en puissance complète du cycle préparatoire aux ENSP), soit dans quelques jours seulement !

    • septembre 2024 : début des modules complémentaires permettant aux étudiants en L3 de préparer le nouveau concours 2025 (ce qui suppose des inscriptions ouvertes dès le mois prochain ? et des cours prêts parachevés par les formateurs cet été ??)

    • juin 2025 : premier concours niveau Licence (version transitoire) + concours niveau Master (maintenu provisoirement pour les étudiants de l’ancien système qui seront en M2) ; création des mentions de master ENSP

    • septembre 2025 : première rentrée dans les ENSP (M1) ; ouverture des L1 PPE et des L2 PPE pour permettre un recrutement dès 2026 puis en 2027 sur la base du concours niveau Licence version stabilisée

    • juin 2026 : concours niveau Licence version stabilisée

    • septembre 2026 : ouverture des L3 PPE ; mise en place d’un comité d’accréditation MENJ-MESR

    • 2027 : fin de la période transitoire.

    A l’image de l’instauration en catimini des groupes de niveau au collège, ce calendrier au pas de charge est une fois de plus éminemment problématique. D’abord, parce que la refonte d’une formation universitaire est une tâche complexe qui ne s’improvise pas en quelques mois. Comment créer dès septembre un module de formation au nouveau concours en L3 alors que le programme du concours devrait être publié (dans le meilleur des cas) en mai ?  Cette précipitation génèrera stress et surmenage aussi bien pour les formateurs que pour les candidats. Elle cristallise le manque total de considération pour les équipes et leur travail.

    Ensuite, ce calendrier est intenable parce qu’il reste encore beaucoup d’incertitudes sur le contenu effectif de cette réforme. La plupart des informations dont nous disposons à l’heure actuelle ne viennent que d’un document de travail. Le ministère a reconnu lui-même que beaucoup d’arbitrages n’étaient pas rendus et qu’il fallait en passer par la concertation avec les organisations syndicales. Comment faire croire à une réelle volonté de concertation, avec des délais aussi serrés, lorsqu’on prétend publier de nouveaux programmes avant même d’avoir fixé une date de rencontre syndicale pour discuter du fond de la réforme ?

     

    Le SNCL déplore cette précipitation et ce simulacre de dialogue social qui risquent bien de tuer dans l’oeuf le projet et d’enterrer avec lui l’opportunité de tourner le dos à la réforme Blanquer.

    Il se félicite néanmoins du fait que cette réforme porte la marque de plusieurs de ses revendications et considère qu’elle va dans le bon sens pour la formation de nos futurs collègues et pour l’attractivité du métier. De nombreux éléments doivent être impérativement précisés, et le SNCL exige un moratoire d’un an minimum avant la mise en oeuvre des premiers changements. Notre syndicat défendra vigoureusement ses convictions, notamment pour la prise en compte effective des années de travail en Master dans la cotisation au système de retraite.

  • Formation des enseignants et rémunération des formateurs

    A l’aube d’une nouvelle réforme de la formation des enseignants avec un déplacement du concours de recrutement au niveau L3, – que le SNCL appelait de ses voeux bien que nous soyons très critique sur la façon dont elle se mettrait en oeuvre – nous vous proposons de faire le point sur les missions et rémunérations actuelles des différents tuteurs et formateurs œuvrant à la formation des étudiants et stagiaires.

    Nous vous tiendrons régulièrement informés des avancées de cette nouvelle réforme qui, nous l’espérons, pourrait permettre d’attirer davantage de jeunes vers ce métier exigeant et dont l’image doit être absolument revalorisée.

    Le SNCL veillera à ce que cette réforme soit bien synonyme de revalorisation du métier d’enseignant.

    Rémunération actuelle des différentes missions de formation :

    Accueil d’étudiants de master MEEF 1

    (Stage SOPA)

     

    Découverte du futur milieu professionnel.

    Observation du quotidien d’un enseignant de la discipline de l’étudiant.

    Prise en main progressive de quelques temps de classe.

    150 euros pour l’accueil d’un étudiant sur une période de 6 semaines.

    Accueil d’étudiants de master MEEF 2 (Stage SIPA)

    En continuité avec le stage SOPA :

    Immersion dans l’EPLE (préparation des différentes épreuves professionnelles du concours).

    Réflexion articulant théorie et pratique en lien avec les UE de recherche,

    Collecte de données et de ressources nécessaires à la réalisation du mémoire.

    300 euros pour l’accueil d’un étudiant sur toute l’année scolaire.

    Accueil d’étudiants AED en préprofessionnalisation/ d’étudiants contractuels alternants.

     

     

    800 euros.

    Accueil des professeurs stagiaires à mi-temps (FSTG)

     

    1 250 euros.

    Accueil des professeurs stagiaires à mi-temps (PSTG).

     

    1 250 euros.

    Indemnité de professeur formateur académique (second degré).

     

     1 509 euros

     

    Maître formateur (premier degré).

     

    1 925 euros.

    Une rapide lecture du tableau précédent laisse clairement apparaitre que les compétences des tuteurs ne sont pas suffisamment valorisées. Le SNCL défend une hausse de la rémunération des personnes engagées dans la formation des futures collègues, dont le rôle est évidemment fondamental, et s’engage à défendre les intérêts moraux et financiers des enseignants formateurs qui consacrent leur temps et leur énergie pour le bon fonctionnement de l’institution.